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Accueil//Chroniques du Tchad

Nouvelles de Mai 07 13/08/2007


                               













Chers amis,  

 De retour au Tchad, ma réadaptation à la langue, au climat, à l’insécurité, au travail et à la culture a été plus rapide et plus facile que je ne le pensais !

Ces dernières semaines, nous avons vécu à l’orphelinat des moments extraordinaires tels que des guérisons d’enfants atteints de maladies graves : tétanos, méningite, hernie étranglée, crise d’asthme sévère, détresse respiratoire. Ces expériences ont permis des relations privilégiées et de qualité avec les familles.

La joie de voir renaître la vie au lieu de la mort, et pouvoir capter les sourires pleins de gratitude des enfants guéris, de pouvoir partager de l’amour et serrer dans les bras les familles qui vivent tant de souffrance…


Les changements dans la situation de l’orphelinat :

Cette année est une année particulière pour l’orphelinat.

Carmen est partie pour une durée de 9 mois et Irène, une nouvelle missionnaire allemande m’accompagne dans le travail médical depuis le mois de janvier. Elle est infirmière comme moi et débute sa phase d’apprentissage de la langue arabe et du français. Les journées sont chargées, j’ai pris les responsabilités médicales de l’orphelinat avec l’aide d’Irène.

J’apprends aussi à gérer quotidiennement une équipe tchadienne d’aide médicale (gestion du planning et des vacances, gestion des relations et des conflits, supervision de leur travail, réunions…).


Le couple directeur Mr et Mme Bénavail nous quittera définitivement en juin. Christian et Ellen, les administrateurs et responsables des activités jeunesses (bibliothèque, club de volley) partiront aussi dans les prochaines semaines. Ce qui signifie qu’à partir de juillet nous ne serons plus que 3 femmes (Anne Marie, Irène et moi) à rester pour assurer le bon fonctionnement des activités de l’orphelinat durant tout le reste de l’année. Saleh, un collaborateur tchadien sera aussi présent pour s’occuper de l’administration et des activités auprès de la jeunesse. Toutes ces nouvelles responsabilités se rajouteront aux activités déjà multiples de chacun… !

Histoire vécue :

Un dimanche matin à 6h30, le gardien m’appelle car un nouvel orphelin et son papa étaient venus de loin pour recevoir le lait nécessaire à l’enfant. Une femme les accompagnait avec un enfant dans les bras. Je pensais que c’était l’orphelin mais il s’agissait de son enfant de 15 jours. Elle allaitait en même temps le nouvel orphelin qui lui, se trouvait emballé dans un linge déposé à terre!


Cette femme avait déjà 5 autres enfants et donc ne pouvait pas le prendre en charge. De plus, elle habitait dans un lieu différent du père. L’orphelin était en détresse respiratoire et avait un muguet buccal. Son état de santé était déplorable mais l’espoir était encore là. Nous avons donc décidé de l’hospitaliser à la pouponnière. Le père lui, est reparti dans son village en brousse pour rechercher une mère adoptrice. Il me promit de revenir le plus rapidement possible, étant reconnaissant que nous prenions en charge son enfant en attendant.


Généralement il est facile de trouver une mère de « remplacement » car la grand-mère ou la tante sont souvent présentes mais parfois il se pose le problème de l’âge, de la maturité et de la santé de celles-ci.


Le père, désespéré, revint une dizaine de jours plus tard mais sans être accompagné. Les femmes dans le village doivent toutes travailler aux champs et la grand-mère est quasi aveugle. Cela devenait alors un grand problème. Quelques jours plus tard nous avons décidé d’aller en brousse pour des visites dans la direction où vivait justement cet orphelin que l’on a surnommé Daoud.


Après réflexion concernant cette situation très délicate, nous avons pris une décision.

C’était celle d’emmener l’enfant dans sa maison en brousse à 5h de 4x4 depuis Abéché. Après maintes discussions avec le père, le Chef de son ethnie, nous sommes tombés d’accord.

Entre temps il avait recouvert la santé, avait grossi de presque 1kg en 3 semaines !
Ce jeudi donc nous sommes partis avec Daoud dans les bras de son père.












Nous sommes arrivés dans ce village, après le passage de pistes ensablées, après un pneu crevé, après des vomissements dus au mal de transport, après la traversée de beaucoup de villages… Quel accueil nous avons eu ! La grand-mère et certaines femmes du village m’ont pris dans les bras en pleurant, elles nous ont remercié infiniment et étaient surprises de nous voir arriver dans leur village. Elles ont regardé Daoud, l’ont pris dans les bras, l’ont béni en lui crachant dessus, et ont remercié Dieu. J’ai ensuite donné à toutes ces femmes des explications sur l’utilisation du lait en poudre ainsi que des conseils d’hygiène… C’est avec une grande émotion que je les ai quittés ! La grand-mère prit l’enfant
dans ses bras. Une main d’une autre femme tenait le biberon, une autre main lui touchait le front, une autre encore lui tenait la main.

Ces instants m’ont beaucoup touché et je ne peux qu’espérer qu’il survive dans sa nouvelle maison en paille entouré de sa nouvelle famille. J’ai appris par la même occasion que sa maman était décédée à l’accouchement. Elle avait eu des jumeaux et l’un deux était resté coincé et cela avait provoqué son décès et celui de sa maman.
Voila les débuts un peu mouvementés de la vie de Daoud qui continue aujourd’hui dans la vie et l’espérance.
La situation du pays :
Il reste dans l’insécurité. Chaque jour nous voyons des picks up militaires et des chars sillonner la ville. Nous entendons que quelque chose se prépare avant la saison des pluies. Parfois des familles viennent en consultation ; certains sont encore sous le choc d’avoir été victimes des « coupeurs de route ». Nous les aidons comme nous pouvons et prions chaque jour pour la situation du pays. Des villages près de la frontière du Soudan sont brûlés, des femmes et des enfants y sont les victimes. De nombreux nouveaux orphelins sont présents dans le nord. Dans certains villages il y en a une trentaine !

 Nous pouvons vraiment ressentir la peur des citoyens d’Abéché. Les coups de feu ne sont pas rares, surtout la nuit. Il y a toujours de la délinquance, des vols à main armés, des meurtres…

À bientôt,

Betty

Mai 2007

 

 
 
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